Le dirigeant doit s’entourer d’experts et s’assurer de leur intégrité pour prendre une bonne décision. L’éthique est intimement liée à la confiance et les deux sont nécessaires pour établir des relations long terme.
Le marché et la confiance
La confiance est le sentiment de sécurité qu’inspire à chacun la perception de prévisibilité et de stabilité qu’il a d’une situation. C’est une composante fondamentale de l’économie puisqu’elle permet une projection dans l’avenir, indispensable à toute transaction telle que le prêt, l’investissement (matériel, financier, humain), etc.
Les causes qui influencent le sentiment de confiance sont multiples. Elles peuvent passer par des attributs matériels (accessoires vestimentaires, voiture, etc.) comme par des éléments immatériels, un comportement, une attitude ou une posture, un prix ou un mode de calcul de prix, des valeurs, des croyances, etc.
Dans une relation client-fournisseur, typiquement, un client (plus ou moins novice) achète à un fournisseur (plus ou moins expert) un bien, un service ou un conseil pour l’intégrer, le transformer ou le revendre. Les motivations d’une telle sous-traitance sont diverses, mais la confiance reste un des éléments essentiels de la relation client-fournisseur, pour l’assurance du respect de la qualité ou du respect des délais par le fournisseur, aussi bien que l’assurance du paiement de la prestation, à temps, par le client.
Client ou fournisseur, toute entreprise est aujourd’hui (inter)connectée, (inter)dépendante, reliée à un faisceau d’experts et de prestataires internes ou externes.
Un petit nombre d’individus constituent le noyau dur de l’entreprise, garants de son identité et responsables de son développement, autour duquel gravite une myriade de gens rémunérés notamment à la tâche.
Aussi constellées que soient devenues les relations humaines et, quel que soit le degré de complexité en jeu, quel que soit le niveau de dématérialisation des communications, des actifs et des marchés, l’être humain reste au cœur de ces systèmes, comme la confiance qui les relie.
Or, l’être humain se caractérise notamment par ses comportements, ses paradoxes, ses désirs et ses peurs, ses valeurs et ses espoirs, c’est-à-dire par toutes ces petites choses qui amènent un aléa dans notre quotidien, et qui nous distinguent des machines.
L’environnement
En dehors de ses conditions de fonctionnement, une machine est globalement indifférente à son environnement. En revanche, le comportement d’un individu et l’environnement s’influencent mutuellement de façon très subtile.
Par exemple, il suffit de l’attitude d’un seul collaborateur pour modifier l’atmosphère d’une organisation dans l’espace (service, département, voire une entreprise entière) ou dans le temps (réunion, rendez-vous, quotidien), pour une durée déterminée ou indéterminée.
Réciproquement, il suffit d’un changement d’environnement pour influer sur, voire modifier, certains comportements.
Pour autant, les principes moraux qui sont à la base de la conduite de chacun, c’est-à-dire son éthique, doivent rester stables, quelles que soient les modifications de l’environnement.
En particulier, dans un contexte de crise, qu’elle soit personnelle (divorce), sociale (grève), économique (récession), nationale (guerre)…, les comportements des individus sont modifiés, et cet écart à leur norme est parfois expliqué, excusé, légitimé, exacerbé, voire encouragé par cette crise.
Mais quelle est la valeur d’une prestation réalisée sans éthique ? Une perte de chiffre d’affaires ou une exigence de rentabilité (p.ex. EBITDA) à court terme justifient-elles un comportement déviant, voire frauduleux ?
Du simple manque de diligence au dénigrement ou au conflit d’intérêts, en passant par la surfacturation ou la trahison d’un secret professionnel, la liste des écarts à la déontologie est longue et non exhaustive.
Mais nécessité ne fait pas toujours loi. Car sans être nécessairement illégaux, les comportements déviants, si faciles à adopter pour un expert sont souvent basés sur l’ignorance du client. Seulement, à moins de le marabouter, celui-ci s’en rend compte tôt ou tard et la relation est dans ce cas directement mise en péril.
Conclusion
Le monde est en perpétuelle mutation, ses frontières sont mobiles et floues, la pression financière est forte et court-termiste, certaines personnalités en vue qu’on érige en modèles n’ont pas toujours des comportements exemplaires ; et sur le plan économique, la compétition vire parfois à l’agression.
À l’heure de la globalisation, de l’uniformisation des droits, de la dilution des responsabilités, de la normalisation du travail et des comportements, c’est-à-dire de l’uniformisation des valeurs et règles qui s’imposent à tous, on voit se développer d’autres mouvements qui visent, eux aussi, à uniformiser les croyances, à éradiquer des coutumes, voire à imposer la dictature d’un « bien pensant », c’est-à-dire à uniformiser les valeurs personnelles.
Alors que le rôle des experts est essentiel aux prises de décision et qu’on attend de leur part un comportement adéquat si ce n’est irréprochable, et même le titre de « conseil » peut prêter à confusion, puisque son usage est réglementé et assorti d’un code de déontologie si on l’exerce en propriété industrielle, mais totalement libre si on l’exerce en innovation.
Dans ce contexte difficile, complexe, chaotique et parfois violent, l’éthique est un moyen de trouver un équilibre entre valeurs personnelles et pression financière, une stabilité qui assure l’avenir des affaires et un des éléments de la sauvegarde de l’état de droit.
Choisir l’éthique, c’est trouver la force de se battre pour préserver son libre arbitre. Mais l’éthique, c’est aussi un rapport au temps. Choisir l’éthique, c’est s’inscrire dans le long terme, s’imposer une rigueur pour bâtir la confiance, essentielle à la pérennité de nos activités. Et la confiance est indispensable pour la transmission d’informations sensibles, essentielle dans un métier d’expert.